Pages : 49 - 52 - 55 - 58 - 61 - 64 - 67 - 70 - 73 - 77 - 81  -  83  -  86  - 90 - 94 - 97 - 100 - 103 - 106 - 109 - 112 - 115 - 118 - 121 - 124 - 127 - 130 - 133 - 136 - 139 ---------->  Retour à Chroniques de la Mémoire

Chroniques de la Mémoire
des Hautes-Pyrénées

N° 70-71-72

Fontaine du Cami-Roumiou à Maubourguet

cliché Sylvain Doussau

Le culte des fontaines

en Bigorre

Les fontaines de Bigorre étaient fréquentées pour la guérison des fièvres et d'autres étaient connues pour la guérison des maladies cutanées. Il semble que le jour de la Saint-Jean, au solstice d'été, l'effet curateur soit à son maximum. Dans nos fontaines, aussi, on jette des pièces de monnaie. L'usage remonte au culte antique. A Agos-Vidalos, la fontaine Saint-Cesté guérit certaines fièvres. A Lau-Balagnas, la plus célèbre est celle dets Espugnaous. Et que dire de l'eau du puits du presbytère d'Orincles qui dégrise instantanément les ivrognes de passage. A Tibiran-Jaunac, trois fontaines sont en concurrence : Hount det camp et crabot, Hount det Bug et Hount d'ero Nano, cette dernière n'ayant pas son pareil pour effacer les goitres. A Lannemezan, celles du Cachot est spécialisée dans les fièvres et celle de Jacobès fait disparaître les verrues. A Vidou, la Hount cristalline guérit les douleurs rhumatismales et certaines maladies des yeux mais, uniquement, les jours de Saint-Jean et Saint-Pierre. Dans le Montanérez, à Ponson-Debat-Pouts, les fontaines de Carbouères étaient très fréquentées par les rhumatisants. Tout près de là, la Hount dous Chourrious balayait sans retard les ophtalmies les plus tenaces. Mais que dire alors de celle de Gleyze-Vieille où l'on se rendait en procession pour la "seconde feste de Pentecoste". 

Catherine la bâtisseuse

Jean Etcheto nous offre le récit des apparitions de la Vierge Marie à 3 fillettes de Montoussé, le 23 juin 1848. Le phénomène a eu lieu dans un buisson, à côté d’une fontaine, près des ruines de l’ancienne chapelle de Nouillan. Le 27, quelques femmes viennent prier sur le lieu. Un bruit agite le fourré qui s’embrase dans une lumière éclatante. Seule, l’une d’elles, Catherine Malaplate affirme discerner Marie dans l’auréole lumineuse. Célibataire, âgée de 24 ans, cette grande brune est une maîtresse femme rompue à l’exercice des travaux des champs. Elle manie la fourche comme un homme et tient la charrue d’une main de fer. Cette belle plante fait autorité dans le village par son franc parler et personne ne doute de sa vision. Sauf le père Peydessus qui, à la demande de l’Évêque, est envoyé à Montoussé pour tester la crédibilité de la belle Catherine qui lui apparaît comme l’incarnation du péché et, subsidiairement, rattraper les fidèles qui pourraient s’éloigner de Garaison. La rencontre a lieu au presbytère, devant l’abbé Fontan, curé du village. La belle, debout, les yeux dans l’autre monde, n’entend pas la péroraison du Père. Elle sera la bâtisseuse de la nouvelle chapelle, quêtera pour réunir l’argent nécessaire et participera aux travaux. Deux ans plus tard, c’est fait. Mgr Laurence ne veut pas d’une inauguration officielle. Las d’attendre, le curé Fontan et Catherine forceront la main du prélat qui acceptera une date de bénédiction pour le 21 septembre 1856. La foule viendra et la tenace Catherine croira au miracle.

collection Claude Larronde

Les fontaines sacrées

Les fontaines de Bigorre avaient parfois un caractère supplémentaire confinant au sacré. Ainsi, celle de Gleyze-Vieille qui dépendait de Sarriac, près de Rabastens, attirait encore, à la fin du XIXe siècle, quelques malades. Les gens de Bazillac et d'alentour s'y rendaient en procession à la "seconde feste de Pentecoste" et le prêtre placé en tête du cortège y disait la messe. La fontaine ne payait pas de mine tout encadrée de murs recouverte d'une voûte maçonnée. On y descendait par trois marches de pierre. On pouvait apercevoir, à droite, un palet à rebords avec conduit d'écoulement terminé à l'extérieur par une tête de mascaron. Norbert Rosapelly y a vu, un jour, de la menue monnaie et des linges sanguinolents jetés sur cet espèce d'évier. Les anciens témoignaient, devant le folkloriste, de nombreuses guérisons miraculeuses sans en être jamais les témoins. De faibles esprits perdaient tout contrôle et venaient auprès d'elle y faire des incantations de caractère magique. A Lareule, la fontaine des Escoubous attirait aussi beaucoup de curieux. La légende de l'évêque Ezzelin raconte qu'en revenant de Saint-Jacques de Compostelle, épuisé de fatigue, il frappa le sol de son bourdon d'où jaillit une source miraculeuse, puis il expira. La canonisation était en route.