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Chroniques de la Mémoire
des Hautes-Pyrénées

N° 52-53-54

Passage du tramway de Gripp

à Sainte-Marie-de-Campan

L'arrivée du chemin de fer

dans les Hautes-Pyrénées

Dans son dernier ouvrage "Petite histoire du thermalisme dans les Hautes-Pyrénées", Michel Dupeyre rappelle les débuts de la grande épopée ferroviaire. Le train arrive dans notre département en 1 859 avec la ligne Morcenx-Tarbes inaugurée par le couple impérial. On la prolongera, jusqu'à Montréjeau, en 1 867. La ligne Tarbes-Bagnères-de-Bigorre est ouverte en 1 868 et celle de Lourdes-Argelès-en-Bigorre, en 1 871. De 1895 à 1905, la Compagnie du Midi fait paraître plusieurs affiches pour chaque grande station pyrénéenne dessinées par les meilleurs artistes. Chaque affiche doit montrer une facilité d'accès à la desserte ferroviaire, la qualité de ses structures et l'attrait naturel et climatique de la destination. Ainsi, l'affiche de Cauterets montre l'écrin que forme la montagne et les fleurs, au premier plan, rappelle la nature environnante. Les stations mal desservies par le train ne pourront survivre. Revers de la médaille, la clientèle thermale se modifiera rapidement. Les riches se font rares et la démocratisation amène la foule dans les stations. Les soins thermaux pour les pauvres sont rares, les horaires précis estompent le romantisme. La Belle-Epoque et ses trains spéciaux comme le "Pyrénées-Côte d'Argent-Express" qui, dès 1910, met Pierrefitte à 20 heures de Paris, en août et septembre, ou le bihebdomadaire "Pyrénées-Express" qui, à partir de 1901, s'arrête à Lourdes, Tarbes et continue sur Luchon, disparaîtront après le grand conflit.

Georges Sand au Foirail

Georges Sand a séjourné plusieurs semaines à Tarbes, à l'aller et au retour des Pyrénées, en 1 825 et 1 837. En 1831, elle y situe toute une partie de son roman "Rose et Blanche". Elle trouve la ville charmante et elle voit, toutes les semaines, à sa porte, un pauvre estropié du nom de Miquelon. Il est assis de côté sur un petit âne et il mendie. Il se plaint d'avoir possédé une cabane et un bout de terre dans la montagne et ne mérite pas son malheur : "Un jour que je travaillais de grand cœur, la montagne a croulé et m'a traité comme me voilà. Le géant s'est couché sur moi". L'écrivain a longuement décrit la foire aux chevaux de novembre, sur la place du Foirail, à Tarbes. La place était inondée d'un peuple bigarré composé de groupes venus de toutes les provinces méridionales de France. On y retrouvait le montagnard métis de Saint-Sébastien, le Provençal irascible et orateur passionné, le Basque petit, musculeux et brusque, le Béarnais moins pétulant mais beau avec une langueur espagnole, puis les champêtres habitants de ces mille vallées avec chacune leur costume, leurs mœurs et leur langue. Ceux de la vallée d'Aure portaient la toque blanche à houppe de laine bleue, ceux de Gèdre, la toque rouge et blanche, ceux de Luz un bonnet rayé et ceux d'Aran, une barrette grise. "Tous ceux de Bigorre affectaient une propreté simple et un costume uniforme".

Ah ! Les filles de chez nous !

Dans son roman "Rose et Blanche", Georges Sand décrit la foule bigarrée venue à la foire aux chevaux de novembre, sur la place du Foirail, dans "la charmante ville de Tarbes". Les Bigourdans qui peuplent la foire sont habillés d'une veste ronde en étoffe de laine brune sans teint, un pantalon large et une toque plate. Ce pantalon est un premier pas vers la nouvelle mode française, précise-t-elle. Le montagnard, qualifié de "végétant ignoré dans le fond des gorges", porte la culotte courte et serrée sur les hanches, les bas blancs ou rayés et l'espadrille en peau de vache, "attachée comme un cothurne autour de sa jambe". La Bigourdane possède la grâce piquante des femmes pâles aux yeux veloutés, aux formes riches et développées qui "rehaussent la finesse prétentieuse du corsage et la délicatesse des pieds et des mains". La montagnarde a le jupon court, la jambe nerveuse, grave et fière sous son capulet écarlate. La grisette béarnaise qui connaît toutes les ruses de la mantille, sait montrer les trésors de sa beauté en feignant de les refermer mystérieusement sous une longue cape, l'Agénoise, hâlée, a des mouvements d'une souffrance voluptueuse et la Languedocienne rieuse, blanche et rosée semble défier l'ardeur du soleil. Georges, quel œil !