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Chroniques de la Mémoire
de Vic-en-Bigorre

N° 121-122-123

En 1789

quel climat social à Vic-en-Bigorre ?

Aidée par des avocats, une assemblée tenue dans l’église Saint-Martin, le 27 mars 1789, rédige un cahier de doléances. Il est signé par 88 vicquois naturalisés, âgés de 25 ans, présents sur les registres des impositions. Vic-en-Bigorre est la 3e ville de la province, avec 3250 habitants - Tarbes compte 6200 habitants, Bagnères-de-Bigorre, 5300. L'assemblée élit 4 députés pour participer aux États de Bigorre, à Tarbes : Carrère, docteur en médecine, Arnaud Dupont, notaire royal, Dominique Lalanne, ancien gendarme de la garde du Roi, Fourcade, avocat, et les a mandaté pour «proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui pourra concerner les besoins de l’État, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et de chacun des sujets de Sa Majesté». La ville est «privilégiée par son statut de commune libre de toute attache féodale, de tout droit seigneurial mais exerce des droits féodaux sur les villages de son canton» affirme Joseph Verley. Ce constat explique la modération dont font preuve les habitants privilégiés. L’église Saint-Martin, ne détient que 3 % du terroir de la ville. Le système de protection sociale issu de l’hôpital n’a pas de comparaison avec la plupart des villes et villages de la  Bigorre. Mais tout ceci concerne la bourgeoisie locale et pas les prolétaires, ni les brassiers et les domestiques. Toutes les conditions d’une révolution sont remplies et, pourtant, elle n’aura pas lieu. En 1783, le curé Jacques Rivière, futur député du clergé de Bigorre à Versailles, note : "Le petit peuple est fait, par moitié, d’immigrés coupés de leurs racines et n'a pas de pratique religieuse". Il sera encore plus pauvre après la période révolutionnaire.

Église Saint-Martin de Vic-en-Bigorre

cliché Julien Tajan - Architecte DPLG

La dîme par un anonyme

col. Claude Larronde

En 1789

pas de révolte à Vic-en-Bigorre

Le vrai problème, c’est la dîme perçue sur les grains, le foin, le vin, la laine des moutons, les agneaux. En sont exclus : le lait, beurre, fromage, le produit des jardins et les porcs. Avec un revenu de 3400 livres - 3400 francs après 1793 - Jacques Rivière est probablement le curé le mieux doté de la Bigorre. Mais le principal bénéficiaire est l’abbé Séris, abbé commendataire de Saint-Lézer, qui vit à Paris. Les autres bénéficiaires ou «fruits prenants» sont l’Évêque et la Fabrique - personnes de la paroisse administrant toutes les grosses réparations de l’église Saint-Martin. On est étonné que cette situation explosive n’est pas entraînée de révolte populaire. À cela, une première raison : une structure sociale éminemment urbaine, pas de propriétaires de taille moyenne, peu de traditions, pas de droit d'aînesse : le père peut déshériter ses propres enfants au profit d’un neveu. Une deuxième raison : la ville est clivée entre possédants et prolétaires. En 1805, il y a 233 nobles et bourgeois anoblis, au XVIIIe siècle, pour le service dans les armées du Roi. Ajoutons à ceux-ci, quelques nobles qui viennent s’installer dans la cité vicquoise dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle : Pasquier de Franclieu, Mme de Palaminy, Mme de Journet qui achète l’hôtel éponyme, en 1789, les Monlezun, Castelbajac, Saint-Pastou de Bonrepaux, Monet de Sombrun. Pour autant, ils ne bénéficient d’aucun privilège sinon de jouir de la capitation noble. Les professions libérales : médecins, chirurgiens, apothicaires, juges, avocats, huissiers, notaires, gros marchands, soit 136 familles, jouent un rôle «d’étouffoir» face aux 537 petits propriétaires, 218 laboureurs, 1151 brassiers, 108 domestiques mal logés et 288 habitants sans profession. 

En 1789

l'administration de Vic-en-Bigorre

L'administration de la ville est bâtie sur le modèle suivant : À Vic-en-Bigorre, l'assemblée générale des habitants est composée de tous ceux qui ont été reçus "voisin" ou, en gascon, "besî" et s'intitule la "Besiàu". Cette assemblée appelée "États de la ville" est réunie, exceptionnellement, pour des problèmes graves. En 1643, elle regroupe, sur la place du Sendreix, jusqu'à 140 habitants pour débattre du sort réservé aux "sorcières". En mars 1789, 88 vicquois participent à la rédaction du cahier des doléances pour la préparation des États généraux du mois d'avril, à Tarbes.
- Une assemblée de notables - 30 à 40 membres - composée de "vieux officiers", élit le "Conseil de Ville". À sa tête, des Consuls - 3 à 5, selon les années, élus pour 3 ans et rééligibles - qui administrent la Ville et font exécuter les décisions du Roi + un collège composé de 2 membres désignés par la Besiàu + 2 membres désignés par le Conseil de Ville + les Consuls sortants. Pour compléter les postes subalternes de l'administration communautaire, une garde terraine et une garde foraine chargées du recouvrement des impôts et neuf dizainiers - la ville est divisée en 9 quartiers - qui sont "agents de police" ou "commissaires de quartiers" élus sans périodicité. À la fin du XVIe siècle, l'autonomie militaire et la police locale ont été supprimées à Vic-en-Bigorre. Depuis, la police relève de la seule compétence d'un lieutenant général de police. Ainsi, l'on peut appréhender l'influence des gens de robe et des anciens officiers dans l'administration de la cité, aux XVIIe et XVIIIe siècles. Plus loin, nous verrons la position sociale qu'ils ont acquise de retour de leurs pérégrinations sur les champs de bataille au service du Roi. 
 

Hôtel de Ville de Vic-en-Bigorre

cliché Claude Larronde